Alain Bernard : Relais caillé

L’ancien recordman du monde du 100 mètres en combi, Alain Bernard, nous reçoit, tête baissée, à bord d’une estafette de l’escadron de gendarmerie de Montargis.

QUESTION : Alain, entre nous, envisagez-vous sérieusement de faire carrière dans la gendarmerie ?
ALAIN BERNARD : Je peux pas, j’ai pas de moustache. Et je m’épile le torse, ça faire rire les collègues dans le vestiaire.

Q. : Vous ont-ils aidé à appréhender la jeune femme qui vous a récemment harcelé ?
A.B. : Une vraie folle celle-là, j’ai reçu plus de 1.000 appels en trois jours, ça me fait un quatrième record du monde. En plus, je sais pas comment enlever le vibreur de mon portable, c’est pire que le Sport-Elec, j’ai chopé une hypertrophie de la cuisse.

Q. : Savez-vous de qui il s’agit ?
A.B. : Les gars m’ont dit qu’elle s’appelait Esther. Elle prétend être nageuse de haut niveau. Avec un prénom comme ça, ça m’étonnerait.

Q. : Votre célébrité nouvelle n’a pas que des mauvais côtés. Faire le plateau de Denisot, vous en rêviez ?
A.B. : J’en ai marre des rumeurs qui m’envoient au PSG. De toute façon, Michel m’a dit que ça serait Jean Todt l’entraîneur, avec Philippe Lucas, s’il ne va pas en prison. (Il s’arrête, pris d’une violente quinte de toux.) Voilà, je m’énerve et mon asthme revient.

Q. : La pollution ne risque pas d’arranger les choses à Pékin…
A.B. : C’est sûr, mais grand merci, j’ai toujours trois tubes de Vento® sur moi. (Il fouille le fond de sa poche pour les montrer et sort une poignée de pilules.)

Q. : C’est aussi pour soigner l’asthme ?
A.B. : Non, non, celles-ci sont pour mon anémie et les autres pour l’hypertension. Je n’aurais jamais pensé avoir tout ça, heureusement que les médecins de l’équipe de France veillent. Laure et Amaury auraient la même chose a priori. Ca doit être contagieux.

Q. : Est-ce que vous craignez Amaury Leveaux justement ?
A.B. : Bah je ne mange jamais de viande rouge, que du poulet de temps en temps. C’est un des secrets de ma réussite.

Q. : La fameuse combinaison Speedo en est-elle un autre ?
A.B. : La combi, ça change rien. Seb Bodet il a la même et il sera jamais champion olympique.

Propos (presque) recueillis par Roger Secrétain

Chpts d’Europe de Barcelone, Lemaitre, Mbandjock : La cour Martial

Cela faisait bien longtemps qu’un athlète français n’avait pas réussi un authentique exploit en finale internationale.

Qui a dit que les championnats d’Europe d’Athlétisme ne servaient à rien ? Courir tous les ans sous les 10 »16 depuis 2007 était donc un signe. Martial Mbandjock, l’ancien Lemaitre, ou peut-être l’ex-futur Sangouma, a enfin la reconnaissance qu’il cherchait. Pour lui, l’exploit est de taille, d’autant plus que personne n’avait misé de Pognon sur lui. Alors, ce bronze européen, il le doit un peu à John Smith, mais à 10 »18 un peu seulement. Pour autant, Mbandjock est-il scandaleusement mauvais ? Si Ronald Pognon lui-même serait bien embêté de répondre, ce n’est pas seulement parce qu’il a égaré toutes ses breloques européennes.

Lemaitre et talons

C’est aussi parce que le 100 m en France n’offre pas souvent de vrai finaliste, y compris en championnat de France. Alors un troisième, ça frise l’accident. « Quatre coureurs en 10 »18, c’est un 100 m historique », s’est même enthousiasmé le champion, pas effrayé d’humilier ses parents et amis dans la presse. Ce n’est pas une raison suffisante pour lui enlever sa médaille, même européenne. Car Dossevi, Darien et Bascou en savent quelque chose, c’est pas donné à tout le monde. Sauf quand on a du talent, évidemment, car de  Baala à Blondel en passant par Diagana, tous les Français ont finalement gagné un jour les Europe, mais aucun ne courait avec un maillot moulant bleu-blanc-rouge. Même face à la dent argentée de Chambers, ça donne l’air con.

Evidemment, Christophe Lemaitre aurait pu s’épargner un tour d’honneur en prenant connaissance des temps.

Mondiaux, Yalouz : La lutte finale

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Ghani Yalouz n’est pas superstitieux. Son nom à consonnance anglophone ne veut rien dire. Pourtant, Doucouré aurait déjà envoyé quelque signes.

Diagana, Perec, Doucouré, Barber, les relais : il n’y a plus personne. Et pourtant, d’aucuns diraient que la sélection française est la plus forte jamais vue. D’aucuns auraient-ils tort ? Sébastien Flute et Jean-Pierre Amat pourraient-ils diriger l’équipe de France d’athlétisme ? Sans aucun doute, mais pour l’instant la place est prise par un autre médaillé barcelonais. Ce n’était pas du tir, mais de la lutte. Il avait fini cinquième. A part un presque champion olympique, qu’est-ce qui a bien pu changer sur les pistes pour que la confiance règne ?

Une génération, des complexés

Si l’arrivée de jeunes leaders talentueux a enfin permis de virer les vieux, qui n’ont finalement pas gagné grand-chose, même ceux qui en avaient les moyens, il manque encore un gros résultat qui ferait naître de l’ambition. Un mot encore tabou dans les catégories adulte, qui signifie première place et pourtant Doucouré avait essayé. L’or est ainsi accessible en longueur comme depuis Emmanuel Bangué, en triple-saut et au 1.500 pour la première fois, à la perche avec enfin un vrai bon, et au steeple puisque c’est devenu une discipline française. Chez les femmes les meilleures chances restent pour Arron et Hurtis et Solen bien sûr. L’objectif doit donc être au moins de deux titres et cinq médailles. Faire moins serait un échec, Yoann Diniz se demande si la marche est un sport. Et Tereza ?

Vous avez posé vos questions sur equipe.vestiaire@yahoo.fr

Salim Sdiri sera-t-il enfin récompensé ?

Le sauteur le plus régulier de ces cinq dernières années ne devrait en principe pas passer l’étape des qualifications. En revanche, il peut très bien connaître un jour sans.

Teddy Tamgho a-t-il le boulard ?

Evidemment, et pourquoi s’en priverait-il ? Riner et Benzema ont-ils honte d’être les meilleurs ? En revanche, une autre place que sur le podium pourrait facilement permettre à Renaud Longuèvre de passer pour compétent.

Renaud Longuèvre est-il compétent ?

Oui et non. C’est-à-dire qu’il a des diplômes et des connaissances qu’il n’a pas volés, mais la plupart de ses jugements péremptoires sur le sport n’ont aucune valeur de crédibilité.

Que signifie de dire de quelqu’un que ses jugements n’ont aucune valeur de crédibilité ?

Qu’il n’y connaît rien.

Peut-on dire d’un entraîneur champion du monde qu’il n’y connaît rien ?

Il existe donc bien un championnat du monde des entraîneurs ? Nous l’ignorions.

Leslie Djhone ?

Si l’athlétisme avait les mêmes règles pour tout le monde, Leslie collectionnerait les médailles et ne serait pas loin du record du monde, et pas celui de Schoenlebe.

Le concours de la perche est-il promis aux Français ?

A-t-on vraiment besoin de répondre à cette question ? Bubka passait-il souvent à travers ?

Le steeple est-il promis aux Français ?

Le dopage est une question épineuse qu’on ne peut traiter en une phrase.

Le dopage est-il répandu dans le monde de l’athlétisme ?

Disons que si la plupart des athlètes faisaient du vélo, ils ne feraient pas forcément de natation en même temps.

Le record du monde du 100 mètres va-t-il tomber ?

Nous venons de répondre à cette question.

Le 4×100 m tricolore sur le podium ?

Evidemment non, sauf s’il y a un témoin.

Medhi Baala en demie ?

Pour la première fois, Medhi Baala ne porte pas tous les espoirs tricolores sur son dos, il a enfin couru aux France, et surtout grâce à ses échecs plus personne ne croit au miracle, ce que les spécialistes appelaient talent. Le miracle est donc possible. Baala peut passer des tours et même prendre le podium mais sa préparation pourrait lui coûter cher. Petite confidence, il peut gagner, car pour une fois il est le meilleur athlète du plateau. Il ne manquerait plus qu’il ait appris à courir. On pensait ça d’Ullrich aussi chaque année.

Qui sera Lemaître étalon de l’équipe de France ?

Alain possible, nul n’est tout nu

Manaudou à la retraite, notre spécialiste offshore s’était promis après Dunkerque de ne plus jamais mettre de tongs pour écrire un papier. L’exploit de William Meynard nous a contraints à le renvoyer dans l’héros. Popov était-il si mauvais ?

La question était, jeudi, sur toutes les lèvres de Manaudou : quelle marque de moule-bite portait Alain Bernard sous sa combinaison ? Arena, qui n’avait plus réussi à faire d’elle depuis le licenciement abusif de ses ouvriers, a donc frappé Antigone d’un gros cou : le gendarme est le premier asthmatique à franchir le mur du çon (46 »94). Son record  pourrait pourtant ne pas être homologué : la natation française vient de découvrir les vertues de la ceinture flottante. Explications.

Le battement a normalement en crawl un rôle plus stabilisateur que de propulsion. Grâce à une flottabilité accrue, et même démultipliée par la nouvelle génération en néoprène, le rapport s’inverse avec une combi: le battement devient propulseur et l’effort global diminue. Ironie du ressort, c’est ce qui a permis à Bousquet, en finale, de ne pas fléchir dans le dernier 25, là où même les plus grands ont longtemps eu le bambou, comme on dit dans le jargon.

La chronologie du record du monde (RM) est d’ailleurs intéressante à analyser : celui de Matt Biondi (48 »42) a tenu de 1988 à 1994, Popov a gardé le sien (48 »21) jusqu’en 2000, Van den Hoogenband (47 »84) pendant presque huit ans. Depuis les 47 »60 de Bernard à Eindhoven, en mars 2008, la meilleure marque mondiale a été descendue cinq fois.

La lutte Fina

Le RM du 100 mètres a donc été battu deux fois plus souvent en 13 mois qu’en 20 ans. C’est devenu tellement banal que L’Equipe, toujours dans l’air du temps, a préféré se pencher pour la cinquième fois en trois semaines au chevet de l’OL, comme si Le Vestiaire ne l’avait pas déjà fait. Et Michel Denisot attend toujours le feu vert de la Fina pour inviter Bousquet aux Guignols.

La Fédération internationale devra en tout cas harmoniser très vite ses règlements si elle ne veut pas tomber aussi bas que son homologue automobile. En attendant, le vrai débat est mis de côté : et si les progrès textiles n’expliquaient pas tout ? « Sous chacune des combinaisons, il ne faut pas oublier le nageur qui est dedans », rappelait le vice-champion de France. « N’oublions pas non plus ce qui est dedans le nageur », relevait Thierry Bisounours depuis la Bourboule : « On ne fait pas d’un Leveaux un cheval de course. »

Pendant ce temps-là, le roi du petit bain Amaury Leveaux passera l’été à Center Parc. Le Vestiaire vous avait pourtant prévenu.