Coupe Davis : S’embraser sous le Guy

Forget avait décidé de ne pas compter sur Llodra. Comme prévu, il n’a pas pu compter sur Llodra.

Samedi soir la Serbie et ses deux sets d’avance en double pensaient bien être les Français de cette finale et Obradovic se prenait pour Forget. Il est vrai que se passer de Djokovic pour le double, c’était pas mal. Mais les Français restent les Français et Forget reste Forget, faut pas le provoquer sur son terrain. Être capitaine de Coupe Davis, c’est influer sur le cours d’un match, notamment sur le mental et la stratégie. C’est même la spécificité de la Coupe Davis. Forget-Obradovic était donc la finale rêvée et comme dans toute finale, il faut attendre le dernier jour pour savoir qui est le maître. Quelques éliminations au premier tour, des branlées mémorables, un relationnel à la carte, un seul titre, Forget n’avait pas encore assez prouvé pour justifier que onze ans c’est déjà pas mal. Il visait plus haut, pour prouver enfin que Mathieu à Bercy n’était pas un coup de chance.

La gloire de Monfils

Cette fois, Mathieu s’appelle Llodra. Il est le joueur le plus en forme, il vient de battre Djokovic en indoor et si la France est en finale c’est grâce à lui. Forget ne peut pas s’en passer. Il va faire mieux : s’en passer. L’objectif est simple, reposer Llodra et fatiguer Djokovic. Pari gagné : Llodra est brisé sans jouer un seul point et Simon pousse le numéro trois mondial jusqu’au troisième set. Le plan aurait pu être parfait si Obradovic n’avait pas eu lui aussi de bonnes idées comme aligner Tipsarevic plutôt que Troicki, auteur d’une fin de saison énorme, en simple, si Zimonjic n’avait pas 50 ans et deux sets d’autonomie et si Clément n’était pas le seul grand joueur de la bande. 2-1 pour la France après le double, il faut agir.

Monfils a toutes les chances de prendre une taule contre Djokovic s’il fournit le même match que d’habitude dans les grands rendez-vous. Mais là, c’est la Coupe Davis, Forget saura trouver les mots. Après Soderling en finale à Bercy, Gaël avait compris tout seul qu’il ne fallait pas passer son temps à défendre et être solide au service. Forget sera là pour le lui rappeler au passage. Cette fois c’est une finale, Monfils passe son temps à défendre et chie ses jeux de service : « Guy m’a proposé plusieurs stratégies. » La bonne aurait suffi.

Paul-Henri Llodra

Llodra comprend rapidement qu’il va falloir jouer. A peine entamé par ses merdes de la veille, il a la bonne surprise de découvrir Troicki, son compagnon d’infortune. « On ne va pas trahir de secret, Tipsarevic va jouer. » Au dernières nouvelles, Chamoulaud ne serait pas recherché par Interpol. 6-2 au premier set, Llodra aimerait tellement s’appeler Simon. La suit,e c’est le chef d’œuvre du capitaine. Mika, qui ne sait plus en quoi consiste son jeu et reste bloqué comme la veille à 20% de premières balles, Chamoulaud qui trouve Troicki injouable comme Youzhny et De Bakker avant lui. Boetsch n’avait, lui, pas attendu la fin du simple précédent pour  rappeler que si Llodra perdait ce n’était pas grave tellement il a apporté à l’équipe. Et pour finir, les larmes du champion, qui savoure le pire moment de sa carrière.

Finalement, tout le monde était au courant depuis longtemps, même Forget, qui a servi ses habituelles conneries d’après défaite. Le groupe prometteur en construction, la supériorité de l’adversaire et ses choix assumés. Ça servait à quoi de jouer la finale ?

La Légende : Guillaume, le grand raout

Après la censure en urgence de son papier sur les championnats de France de ping-pong, notre spécialiste se venge en rendant hommage à Rafael Nadal.

lunettes

Roger Federer aurait-il connu la même carrière si sa première victime n’avait pas porté de lunettes ?

C’est en lui collant deux fois 6-1 lors de son premier simple que Jakob Hlasek lui donne le goût du double. Mais le Suisse jouera avec Forget. Mark Woodforde aura beau lui faire la même chose quelques semaines plus tard, rien n’y fait : Raoux soutiendra une décennie qu’un demi-terrain n’est pas trop grand pour un seul joueur, même s’il a commencé son sport à 8 ans. Nous sommes en 1989 et quelques temps après sa première victoire sur un Allemand, il goûte aux joies d’un trophée. Battre un tennisman sénégalais en finale est donc possible, que le tournoi soit en Guadeloupe aussi. La semaine suivante, il bat Boetsch, déjà un peu scientologue, puisque c’est en Martinique.

Le presbyte erre

C’est en 1998 qu’on entend à nouveau parler de Raoux. Federer n’a que 17 ans et deux défaites ATP derrière lui en autant de matches, ça excuse un peu les quatre jeux qu’il laisse à son adversaire et les quatre balles de break ratées. Dommage qu’il en ait eu huit au total. Le vainqueur de Brisbane 1992 a beau avoir 28 ans ce jour-là, son palmarès compte aussi Brisbane 1992. Raoux n’a jamais aimé les mondanités, préférant ces petits voyages en province. Brest, Nantes et Dijon sont des villes reposantes et l’on y est rarement emmerdé par les groupies et les Top 100. Le débat est relancé : gagner la Coupe Davis, est-ce vraiment une reconnaissance ?

Rafael Nadal ne porte pas de lunettes et vient d’enquiller Monte-Carlo et Rome. Jusqu’à Madrid au moins, il sera à bloc avant le bloc.