Coupe Davis : Virer sa Kulti

A l’occasion de la disparition prochaine de la Coupe Davis par une Coupe du monde de tennis en deux simples un double et deux sets gagnants avec 20 millions à la clé, revivez l’un des plus grands moments de l’histoire de la compétition. Ce jour où Arnaud Boetsch a gagné un match.


Arnaud Boetsch a 27 ans lorsque, ce 1er décembre 1996, il entre sur le court de Malmo. Il n’avait rien demandé.

17 heures. Jusqu’ici, son nom évoque vaguement le camarade de régiment de Chesterfield dans les Tuniques bleues, ou le finaliste de Lyon, double vainqueur à Toulouse, mais pas davantage. Personne n’imagine qu’il pourrait aussi être le partenaire de Robert Redford dans le rôle de Boetsch Cassidy : Paul Newman n’était pas puceau. Agassi non plus lorqu’il accepta d’echanger quelques balles avec Nono au troisième tour de Roland-Garros en 1990. Des balles peut-être trop grosses, une raquette peut-être trop lourde, peut-être pas la même catégorie d’âge : 20 ans tous les deux.

Starsky et Boetsch

Mais en ce jour de 1996, la chance semble avoir tourné, à défaut du talent. Après la volée classique prise face à Enqvist, Arnaud devait offrir sa dernière heure de jeu à Edberg et un saladier bien assaisonné en prime. Même quasi grabataire, Stefan le volleyeur n’aurait pas renié un dernier titre, il l’avait bien fait comprendre à Pioline le vendredi précédent, mais Cedric avait vu son psy juste avant le match. Avec l’âge, on devient pudique, et humilier Nono ne lui dit rien de bon. Edberg a toujours agi ainsi avec les nuls. En 1989, il avait donné Roland-Garros à Chang, cette fois c’est la Coupe Davis qu’il offre. Jamais avare.

Fabrice cent euros

Se présente donc Kulti. Niklas, on le connait à peu près autant que son adversaire imberbe. C’est l’homme qui permit à Leconte en 1992 de faire croire qu’il n’était pas fini, avant qu’Henri ne découvre l’effet Korda. Le drogué, pas le photographe. Le Che devint une icone, pas Riton. La France va donc remporter cette Coupe Davis, c’est certain.  Mais c’est encore surestimer Arnaud Boetsch que de l’affirmer. A l’époque, il est considéré comme le second de Pioline. Loin derrière, certes, mais loin devant les autres. Et la concurrence est forte : de Raoux à Delaître, de Fleurian à Golmard.

Il y a surtout un jeune qui n’est déjà pas très bon et que chacun aimerait déjà voir à la retraite : Fabrice Santoro. Son rêve, s’en mettre plein les poches avec son éternel niveau de junior surclassé. Il le fera. Boetsch gagne le premier tie-break puis perd les deux sets suivants, même les trois. Mais le tennis aime respecter la hiérarchie et Kulti aussi. Le Suédois, dans un grand jour, loupe toutes ses balles de match. Davydenko n’y est pour rien.

Cinquième set, 7-8, 0-40, service Boetsch. Les transistors s’éteignent. Quand ils se rallument vingt minutes plus tard, Boetsch est consultant sur France télévisions.

Gouverner, c’est fait d’erreurs

 

« Il est injouable. » Arnaud Boetsch a de la mémoire : d’après ses calculs, jamais il n’aurait poussé la balle assez fort pour prendre un point à Nadal. Il ne doit pas être si mauvais ce Federer.

Faut-il être toujours le patron du circuit pour décider, à deux jours d’intervalle, de jouer son meilleur match et son pire à Roland-Garros ? Sauver deux balles de set dans la première manche, remporter la seconde au tie break, perdre la troisième et finir en quatre sets, c’est le choix du maître. Djokovic l’a subi le vendredi, Nadal l’a infligé le dimanche.

Le point commun est comme toujours Federer. Federer est le plus grand, Federer est fini, Le Vestiaire a déjà tout expliqué. Ceux qui avaient prévu un match de rêve dimanche ont toujours pu se repasser la cassette de la demie. La finale était pourtant instructive : une balle de set ratée puis un set perdu, 56 fautes directes, des sautes de concentration, Nadal mené 0-40 qui gagne 6-1. Les grands champions sont ceux qui jouent leur meilleur tennis aux moments importants. Du grand Federer, donc : on ne se remet pas si facilement d’un Roland-Garros gagné contre Soderling. S’il ne tombait pas toujours sur Monfils, Roger quitterait volontiers Paris précipitamment.

Taillé à la serbe

La seule possibilité de revoir Federer sur un terrain, après un an à perdre contre Berdych, Soderling et à gagner le Masters, était de lui trouver un truc qu’il n’avait pas encore fait. Il a battu tout le monde, il a fait pleurer Murray devant maman, il a gagné le double aux JO avec Wawrinka. Après ça, battre Nadal n’est plus assez vibrant. Mais il a entendu Pioline lui dire en début de tournoi qu’il n’était pas favori derrière Nadal et l’imbattable Djokovic. Il va donc humilier Pioline, puis l’imbattable Djokovic.

Djokovic frappe la balle dès le rebond ? Il ne fera que des volées. Djokovic s’est mis à gagner les points importants ? Il gagnera tous les autres et décidera qu’ils sont plus importants. Djokovic l’avait battu après avoir sauvé une balle de match à l’US Open quand le Serbe n’était personne ? Il le battra en sauvant une balle de set quand il est devenu quelqu’un. Djokovic dit « come on » en serbe ? Il dira « come on » dans un anglais parfait. Djokovic a été invité à Cannes par Denisot ? Il fera 5,3 millions avec Chamou un dimanche après-midi. Djokovic doit gagner la finale ? Il la perdra à sa place.

T’as pas sans Bâle ?

Etre le plus riche de l’histoire du tennis, même si Santoro a fréquenté Borotra, oblige aussi à savoir compter. Le record de McEnroe c’était aussi pour ce vendredi. Pioline, qui n’a décidément pas compris, le félicite chaudement et salue son grand retour, avec les yeux de celui qui le voit déjà favori pour dimanche. « Non, McEnroe n’a pas besoin de me payer une bouteille de champagne. J’ai dit à Novak au filet que c’était déjà spécial ce qu’il venait de faire. Rafa doit être content, lui qui venait de perdre quatre fois de suite contre Novak. » Il y en a pour tout le monde, le public et Chamoulaud sont en transe sans bien comprendre pourquoi l’humilité est plus belle avec un sigle RF calligraphié sur chaque habit.

Pendant ce temps-là, Federer a déclaré forfait à Halle. Le gazon, ça ne l’intéresse plus.

Roland-Garros, Bartoli : Jeremy love Hewitt

c-fou

Luyat no stress sur la terrasse, Golovin au balconnet, Monfort avec Rufin et Sylvette, Mauresmo qui se coltine un mauvais stagiaire avec un cheveu sur la langue : tout le monde est à sa place.

Nicolas Mahut avait donné rendez-vous aux médias à l’issue de son premier tour. Une victoire, disait-il. De quoi foutre un nouveau coup aux places boursières du monde entier, qui avaient tout envisagé sauf ça. Vérification faite, nous n’avons pas affaire à un mythomane. Thierry Champion était même là pour assister au triomphe, avec une pointe de jalousie : lui aussi aurait aimé réussir à passer un tour avant ses 29 ans. Le sympathique et disponible Nicolas l’était presque autant lorsque son sourire de Kevin Bacon s’est figé au deuxième tour au moment de s’adresser à un ramasseur de balles récalcitrant. « J’ai un coup à jouer », affirmait-il avant la rencontre. Le service, probablement, mais ça pourrait ne pas suffire à chaque fois (6-1, 3-6, 7-6,6-4).

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A l’origine, nous devions rencontrer Marion Bartoli. Malheureusement, le maître d’hôtel ne mit pas assez de lait pour couvrir ses Cheerios miel-amandes, du coup, elle a tout dégueulé sur Rezai. Peut-être lui reproche-t-elle d’avoir volé son certificat autorisant à ne taper que des demi-volées, mettre des mines des deux côtés et servir comme une mule. Ou même pourquoi pas  d’être meilleure et plus jolie.

Gaël Monfils aurait pu aussi avoir le droit de jouer le troisième tour, mais il a été victime du syndrome Patrice Dominguez. Ce phénomène qui transforme les gros nuls en joueurs top niveau, manque de chance, il se manifeste toujours face à des joueurs français. Ainsi, Vliegen l’avait utilisé contre Gasquet, Brands s’en est servi en début de match contre Tsonga, au point qu’au bout de deux jeux, Dominguez le comparait déjà à Soderling, et hier soir c’est Fognini qui a activé le système pour conclure face à Monfils. Chardy aurait aimé avoir cette excuse : « A 5-5, je fais un mauvais jeu de service … J’ai senti un petit vent de panique et Hewitt a su en profiter. Sur le Central, le coup de panique défile très vite. » Pas mieux, Le Vestiaire va  avoir du mal à lutter.

Quel est le point commun entre Jim Courier et Cédric Pioline ? Pas le nombre de Grand Chelem gagnés, mais la reconversion : les deux interrogent les vainqueurs de grands matches sur de grands courts de Grand Chelem, en anglais, sans traduire au public. Heureusement, tous les spectateurs de Roland-Garros parlent anglais.