France-Angleterre : Un maigre Buttin

Thierry Dusautoir devrait bientôt reprendre son rôle de sélectionneur.

William Servat, Julien Bonnaire, Lionel Nallet et Julien Dupuy ne l’avaient pas invité à leur jubilé, dimanche, et pour un peu son intrusion serait passée inaperçue. La fiche technique est pourtant formelle : Maxime Mermoz a bien remplacé Vincent Clerc à la 36e minute. C’est sa grand-mère qui a dû être contente.

Celle de Wesley Fofana aussi, mais pour d’autres raisons. Le petit a marqué contre le XV de l’arrose son quatrième essai en quatre matches. Promis, il essaiera aussi de faire des passes la prochaine fois.

L’indulgence Ouedraogo

Mais ne soyons pas trop dur avec ce XV de France encore en rodage. Les deux-tiers de l’équipe ne jouent ensemble que depuis quatre ans. Comment voulez-vous qu’elle trouve des automatismes dans ses lancements avec aussi peu de vécu ?

Contre les athlètes écossais, nos Bleus ont d’abord appris l’endurance. Puis la conservation du ballon contre l’Irlande et les coups de pied de plus dix mètres contre l’Angleterre. A Cardiff le week-end prochain, Philippe Saint-André leur montrera peut-être comment taper un drop. Les placages attendront la tournée d’été. Chaque chose en temps.

Fritz au four

Le moustachu sans moustache est toujours aussi sympathique avec les journalistes et c’est surtout ça qui compte. Pour leur faire plaisir, il a même été jusqu’à reconnaître ce lundi qu’il lui avait fallu un mois et demi pour se rendre compte que certains de ses joueurs n’avaient pas le niveau international. Patience, le jour viendra peut-être où il offrira à Rougerie la même sortie grandiose qu’à Lionel Nallet.

C’est à se demander ce qui est le plus inquiétant aujourd’hui. Que Clément Poitrenaud soit le meilleur arrière depuis deux matches ? Que les Anglais sachent jouer au rugby quand ils ne finissent pas leurs concours de lancers de nains à cinq du mat’ ? Que même Rhys Priestland est meilleur que Trinh-Duc au pied ? Ou que sept millions d’imbéciles continuent à regarder de telles daubes chaque week-end ?

Pendant ce temps-là, Yachvili se demande quelle excuse il va bien pouvoir trouver cette fois pour retourner sauver Biarritz.

France-Galles : Le temps des cathédrales

« C’est certainement la demi-finale la plus vilaine de l’histoire de la Coupe du monde. » Marc Lièvremont connaît donc un peu le rugby.

C’était peut-être la couleur des maillots gallois. Ou la coiffure de Toby Faletau. Toujours est-il que ce France-Galles a beaucoup ressemblé à France-Tonga, avec quelques repris de justice en moins dans les tribunes. Pour passer en finale, nos Bleus ont usé des mêmes stratagèmes que pour se hisser en quarts : un jeu stéréotypé, beaucoup de suffisance et des coups pieds ratés en enfilade. Il n’y a pas de secrets.

Maxime Médard a allumé au-dessus de l’Eden Park assez de chandelles pour éclairer Auckland pendant deux mois. Plutôt bien vu quand on a en face un ailier de près de 2 mètres. Mais dans un souci d’équité, on ne s’arrêtera pas trop longtemps sur les cas personnels : Mermoz et Rougerie n’ont pas eu la chance de toucher le ballon.

Des quiches au Poireau

Ceux qui s’inquiétaient de la vilaine tournure prise ces dernières années par le rugby mondial sont aujourd’hui rassurés. On peut toujours gagner un match avec trois pénalités et deux franchissements en quatre-vingt minutes. On peut aussi marquer zéro point en deuxième mi-temps et se qualifier pour une finale de Coupe du monde. L’amateurisme n’est pas mort.

Les choses ont heureusement un peu évolué depuis 1987 en matière de sécurité. Pour que plus jamais un joueur de Fédérale 3 n’ait à rentrer chez lui en fauteuil roulant le dimanche après-midi, les méchants placages cathédrale sont désormais interdits et on va bientôt supprimer l’impact en mêlée. Jean-Baptiste Poux a de l’avenir.

Halfpenny lane

Il faudra surtout retenir de ce match l’abnégation collective grâce à laquelle les Français ont pu résister pendant plus d’une heure à quinze contre quatorze. La mêlée bleue a à peine reculé quand Jamie Roberts a fait semblant de pousser à la place de Warburton et Vincent Clerc, Alexis Palisson, Thierry Dusautoir, Pascal Papé, Lionel Nallet, Morgan Parra et Dimitri Yachvili, entre autres, ont gardé leurs forces pour les All Blacks.

Heureusement, le Pays de Galles avait un buteur prognathe ce matin et Demicentime a raté pour la première fois depuis ses quinze ans une pénalité à moins de 70 mètres des poteaux. Et si les Poireaux ont tant vanté les bienfaits de la cryogénie pendant leur préparation, l’équipe de France, de son côté, a sans doute privilégié la lacrimogénie : elle est nulle à pleurer.

France-Angleterre : Moody soient-ils

La barre sera très haute pour Philippe Saint-André et Michel Polnareff en 2015.

De notre envoyé spécial permanent à Dargaville

Héroïques ! Incroyables ! Irréductibles ! On se demande avec quel adjectif L’Equipe va bien pouvoir barrer la Une de son édition Pdf aujourd’hui. La France a piétiné le champion d’Europe en titre et le monde lui tend maintenant les bras. Comment le trophée Webb et lisse pourrait échapper à une équipe aussi courageuse et solidaire ? Elle a retrouvé en une semaine des valeurs qu’elle n’avait plus montré depuis les cinq dernières minutes de son match contre le Canada. Toute la Nouvelle-Zélande tremble déjà et pas seulement autour de Christchurch.

Les fines bouches regretteront peut-être le point de bonus défensif abandonné aux Anglais en fin de match. Ce serait oublier trop vite cette copie parfaite rendue par nos Bleus : deux essais partout, seulement quinze placages ratés et trois points enquillés après la pause. Rien que ça ! Yachvili n’a même pas eu besoin de passer ses coups de pied. A quoi bon risquer des crampes après vingt-cinq minutes de jeu quand son équipe domine autant son sujet ? Les All Blues se sont retrouvés cette semaine autour d’une bière et ce n’est pas un arbitre alcoolique qui allait empêcher leurs gros d’entrer systématiquement en mêlée avant la fin du commandement.

Un Poux dans la tête

La grande Histoire de la Coupe du monde retiendra surtout l’abnégation de cette belle équipe d’Angleterre, qui y a cru jusqu’au bout après avoir lâché en première mi-temps autant de ballons que pendant toute sa campagne victorieuse de 2003. Wilkinson était déjà là et on se demande aujourd’hui s’il vaut mieux avoir à l’ouverture un faraud avec deux matches dans les jambes à ce poste ou un autre qui en a joué cinquante de trop ? Toby Flood a bien une idée, mais ses copains préfèrent le lancer de nains et Ashton réserve son plongeon Superman pour la partouze de ce soir.

Marc Lièvremont, lui, n’aura pas besoin d’échanger son ADN avec les femmes de chambre néo-zélandaises. Son caleçon est déjà bien humide, tant il a apprécié la performance de ses anciens joueurs. Sa stratégie était aussi fine que sa moustache naissante : emmener son équipe au casse-pipe et l’abandonner en cours de compétition pour qu’elle se débrouille toute seule. Il fallait y penser. Harinordoquy était tellement absorbé par ses nouvelles responsabilités de sélectionneur qu’il en a oublié de faire des placages. Mais tant que Dusautoir gardera son oeil du tigre et sa joie si communicative dans la victoire, tant que Rougerie ne se fera pas pénaliser plus de cinq fois par match et tant que Poux aura une colonne vertébrale, la France peut aller très loin dans ce Tournoi des 6 Nations.

Pendant ce temps-là, le Pays de Galles joue et gagne. Ce n’est donc pas incompatible.

NZ-France : Mealamu du slip

« On vient de perdre 47-17 en prenant trois, quatre ou cinq essais… » Que pouvait donc bien regarder Marc Lièvremont sur son ordinateur portable ?

De notre envoyé spécial sur le Mont Eden

Julien Bonnaire n’a même pas levé les bras au coup de sifflet final. Le seul qui avait dit tout haut en conférence de presse d’avant-match ce que toute l’équipe pensait tout bas (« si on doit gagner, tant pis ») a eu le triomphe modeste sur la pelouse d’Eden Park. La France venait pourtant de mettre son plan à exécution avec une précision diabolique : perdre exprès contre les Blacks pour éviter l’Afrique du Sud en demi-finale, mais pas trop exprès quand même pour que ces connards de journaleux néo-zélandais ne nous accusent d’avoir fait exprès de perdre. Lièvremont est un génie.

Mais qu’est-ce qu’il ne faut pas faire quand même pour faire croire à 60.000 éleveurs de moutons et quinze randonneurs expatriés qu’il valait mieux lâcher $460 que de se saouler à la Steinlager. Nos pauvres Bleus ont été obligés de jouer à fond pendant 8’15’’. On a alors vu Morgan Parra prendre autant d’intervalle (1) que Trinh-Duc en deux matches, mais on peut avoir 90% de domination territoriale, enchaîner gentiment les passes dans les 22 adverses et se prendre malgré tout un essai sur la première accélération de Nonu.

Ni vous Nonu

L’équipe type du moment de la météo du mois de septembre de Marc Lièvremont pouvait enfin se concentrer sur son quart-de-finale. Elle avait fait tout son possible, mais ces Blacks-là sont tout simplement trop forts. Tant pis, il faudra jouer l’Angleterre et le Pays de Galles pour espérer une finale et Picamoles a bien fait de ne pas essayer de plaquer Cory Jane sur le deuxième essai. Une blessure est si vite arrivée dans le rugby moderne.

Le rugby moderne, c’est ce que les All Blacks et l’Australie arrivent à faire quand on les laisse jouer. C’est tellement beau à voir que les gros français se sont arrêtés ce matin de plaquer à chaque fois que Dan Carter et le beau Sonny avaient le ballon. Ils attendront sûrement la finale pour les agresser et les empêcher de jouer comme en 2007 à Cardiff ou comme l’Irlande la semaine dernière pour battre les Kangourous.

Il vaut mieux cacher son jeu jusque-là et nos petits gars l’ont bien fait. Même la mêlée a fait semblant de reculer d’un mètre à chaque impact et Morgan Parra, qui a essayé de copier ce que faisait Dan Carter comme une danseuse de Madison règle son pas sur celui de sa voisine, est un bien meilleur acteur que ne pourraient le laisser penser ses publicités pour Clio.

Sons of a Hore

Un « carton », un « tampon », un « caramel », une « fistole » (sic), un « placage énorme » : Christian Jeanpierre n’avait bientôt plus assez de mots dans son dictionnaire des synonymes pour commenter ce « choc de titans ». Parce que les Néo-Zélandais, même s’ils auraient bien voulu et qu’ils ont joué toute la deuxième mi-temps en trottinant, n’avaient pas le droit, eux, de faire exprès de perdre. John Key ne leur aurait jamais pardonné.

Heureusement, la France a sauvé les apparences sur un essai dantesque de Mermoz. Une interception, zéro passe : ça valait bien un tour d’honneur à la fin du match, d’autant que le remplaçant de luxe François Trinh-Duc y est allé lui aussi de son essai à zéro passe. Et dire que Guirado est resté dans les tribunes.

Et si la vraie « French farce » était d’avoir gardé pendant quatre ans un sélectionneur aussi compétent que son prédécesseur ?

BONUS LE VESTIAIRE : THIERRY LACROIX ET LA BANNIERE

« Ca fait que 19-0, c’est pas énorme. Je suis très satisfait de cette première mi-temps. »

« Si la suite est logique, la France retrouvera les Blacks en finale. »

« Ils ont par marqué en étant meilleurs que nous, ils ont marqué sur nos erreurs… »

France-Ecosse : Le Guirado de la méduse

Les champions d’Europe en titre ont fait boire la tasse à l’Australie du Nord. A quoi bon défendre ?

Ceux qui arrêteront cette équipe de France ne sont pas encore sortis des bourses écossaises. C’est simple, elle n’a plus perdu un match dans le Tournoi depuis le 15 mars 2009. C’était en Angleterre (34-10) et Le Vestiaire avait alors été bien dur avec Marc Lièvremont et ses deux faire-valoir. Notre spécialiste sports régionaux doit aujourd’hui se faire une oraison : le tryo de Marcoussis a accouché d’un rouleau-compresseur taillé pour l’hiver. Si la Coupe du monde se jouait en février ou en mars, Yoann Huget verrait sûrement que Webb-Ellis n’est pas qu’une marque de chemises.

La grande Ecosse, celle là même qui n’avait pris que 49 points contre la Nouvelle-Zélande, à l’automne, avant d’en coller 3 aux Samoans, n’a pas existé dans le chaudron de Saint-Denis. Tout juste a-t-elle pu marquer trois essais ; une première sur ses dix-huit dernières sorties internationales. Il faut dire qu’elle avait en face une formidable machine offensive, qui a marqué en un seul match autant d’essais que sur tout le mois de novembre. Fidji compris.

Guilhem le suive

Comment donc expliquer une telle montée en puissance ? Palisson, Estebanez, Andreu et Porical n’ont pas trouvé de réponse, samedi soir, devant leur télé. Ca aurait peut-être été plus simple si Huget, Mermoz et Traille avaient pu se joindre à eux. On est en tout cas rassuré sur la capacité de nos Bleus à jouer sans ce dernier à l’ouverture. Le réservoir de talents est tel dans le Top 14 qu’on pourrait aussi sans doute s’en passer à l’arrière.

Parce que le XV de France aujourd’hui, ce n’est pas qu’un ouvreur champion de Tomate ou une demi-douzaine d’avants qui ne tiennent pas un ballon. C’est aussi des remplaçants si solides que toute l’équipe du Vestiaire est allée pour la première fois à la messe, dimanche, prier pour que Servat soit épargné par les blessures jusqu’en octobre. Soyons juste, quand même, avec Guilhem Guirado : il n’a pas fait une plus mauvaise entrée que Chabal ou Ducalcon.

Pendant ce temps-là, on devrait bientôt en savoir un peu plus sur la dangerosité des tables de nuit néo-zélandaises.

Springboks-France : La carabine Aplon

taille

 

Par notre spécialiste rugby Peyo Greenslip Jr

Le Super 14 est finalement un tout petit peu plus fort que son homonyme français, pourtant au Top. Les champions d’Europe sont finalement un tout petit peu plus nuls ques les champions du monde. Mais y a-t-il vraiment du rugby en Europe ?

Quarante-neuvième minute, le nouveau petit prince du rugby français, accessoirement demi d’ouverture, assure parfaitement sa passe aux mollets de son capitaine, qui rate de peu son aile de pigeon, mais parvient quand même à servir un ailier sud-africain, qui n’a alors que 90 mètres à parcourir. Poitrenaud, bien placé en couverture, peut tranquillement admirer la fréquence de son vis à vis au moment de déposer le ballon dans l’en-but tricolore. Quel plus beau symbole que les trois meilleurs joueurs français donnant leur pleine mesure à l’unisson ?

Spring boxe

Il ne faut pas s’y tromper, à une grosse quinzaine de conneries près, les Français ont joué à leur meilleur niveau, le même qui leur fit dominer les grosses équipes européennes il y a quelques mois. Samedi, Irlandais, Anglais et Gallois auraient encore pris une volée par les Bleus, pour la simple raison que ces nations ne valent plus rien ogive entre les mains. Curieusement,  notre spécialiste avait cru bon de ne pas se réjouir d’un Grand Chelem acquis contre personne par une équipe sans âme et autant de joueurs valides. Il reste un peu de temps pour renaître, pour se souvenir qu’il y a longtemps, un homme que l’Hexagone a oublié malgré ses lunettes, bâtissait des murs avec les paupières de Betsen et la prostate de Pelous. Ça jouait pas, ça gagnait peu, mais ça évitait les branlées. Désormais, ça essaie de jouer, mais c’est naïf comme Bastareaud dans une soirée table de nuit.

Le Crabos pince dort

Puisque conquête, défense et discipline sont redevenus des mots tabous, comme en 1992, peut-être que le Midol n’aurait pas dû faire croire que les Bleus étaient une grosse équipe. Ça aurait évité aux tricolores de se Reichel, mais au moins Lièvremont n’est pas dépaysé et continue d’entraîner les moins de 21 ans. Pas de joueur par joueur donc, Parra et Millo-Chlusky pourraient mal le prendre, Szarzewski se ferait surnommer Gonzo et  Domingo chercherait des Poux à Mas. Pas un mot de plus, non plus sur Mermoz et Marty, ni sur Sella, Glas, Traille, les Boniface ou Jean-Pierre Lux d’ailleurs. Vincent Clerc va finir par apprendre à jouer du Vuvuzela.