Les années Armstrong : 1997-1998, l’overdose du Tour (3/3)

Armstrong n’était pas là, il avait fort à faire avec ses testicules.

Cela s’est passé à Courchevel, le 20 juillet 97. Ce jour-là, le Tour a définitivement basculé dans le spectacle grand guignolesque. On avait bien déjà vu un Letton remporter quasiment trois étapes de montagne consécutives dont un contre-la-montre (en mettant Indurain à plus de 3 minutes), on avait également vu un Danois ridiculiser ses adversaires sur grand plateau dans une des montées les plus difficiles devant un Patrick Chêne gueulard et stupéfait et un Bernard Thévenet admiratif et jaloux. Mais jamais une équipe entière n’avait osé se montrer sans honte aussi forte sur l’étape reine d’un Tour. La Gewiss de 95 avait ouvert la voie du n’importe quoi, la Festina 97 l’a professionnalisé.

Oh ta came!

Entre Bourg-d’Oisans et Courchevel, l’équipe de Richard Virenque avait donc décidé de « tout faire péter« , selon les termes du Varois. Le soigneur Willy Voet, futur héraut de la lutte antidopage, relatera cet épisode onirique dans son livre « Massacre à la chaîne ». Les sept coureurs de Bruno Roussel, « préparés » comme jamais pour tenter de faire craquer Jan Ullrich, confortable maillot jaune, vont innover. Ils ne vont pas attaquer chacun leur tour, mais ensemble. Ainsi dès la première difficulté du jour, les Festina, sur leurs bolides, se détachent irrésistiblement et s’échappent. Ils sont tous là, seuls aux commandes de l’étape. La démonstration de force durera 2 heures, avant que les événements ne tournent en leur défaveur. Ullrich, piégé, attendra Riis pour l’aider à revenir, et se fera accompagner… des insoupçonnables feu Pantani et Jimenez. Tous ces noms, ça vous classe une époque ou pas. Virenque gagnera l’étape devant Ullrich. Le mal était fait. Le Tour allait survivre, mais rien ne serait plus jamais comme avant et surtout pas la santé des coureurs. On ne saura sans doute jamais qui a décidé que ces exploits surnaturels étaient allés trop loin et qu’il fallait révéler au grand jour ces pratiques, connues des seuls milieux cyclistes et médiatiques.

Marco caïne

Toujours est-il que par une belle journée de 1998, Willy le soigneur fut mystérieusement arrêté avec dans sa voiture de quoi soigner pendant des siècles la belle-mère de Rumsas. On connaît la suite. De fil en aiguille, l’usage généralisé de l’EPO fut découvert, perquisitions, procédures, aveux, suspensions… Tout cela était tellement hors de contrôle, que l’histoire déboucha même sur la victoire de Marco Pantani dans le Tour de France, puis par son décès quelques années plus tard. L’affaire Festina et ses conséquences eurent pour conclusion une baisse sensible de la consommation d’EPO et le début de l’ère du renouveau, à partir des années 2000, avec une grande partie des acteurs (loin d’être has been) des années 90, l’ère du dopage sanguin. L’ère Lance Armstrong

Pendant ce temps-là…

10 réponses sur “Les années Armstrong : 1997-1998, l’overdose du Tour (3/3)”

  1. Je ne suis pas tout à fait d’accord avec votre opignon concernant Prud’homme. Il est à la tete d’une entreprise à capital consequent, et choisir de dénoncer le dopage dans le cyclisme aussi clairement que l’ont fait des anciens coureurs, certains journalistes ou medecins serait suicidaire pour sa boite. Ca serait faire passer le message qu’il nous vent du vend, meme si ça n’est pas tres eloigné de la realité.

    Au contraire de JM Leblanc, qui faignait de decouvrir le dopage en 98, et comme vous le precisez d’ailleurs, lui, choisi d’en admettre l’existence, et son action prouve qu’il le considere comme un veritable fléau.

    Sa position etant tres inconfortable, je pense que c’est le mieux qu’il puisse faire, en tant que chef d’entreprise. Il doit se limiter à etre ferme vis à vis de ceux qui avouent avoir triché. Meme si c’est injuste, puisque Riis, par exemple, n’etait pas le seul dans ce cas là, mais par contre il etait bien le plus fort.

    Sans etre hypocrite, Prud’homme ne peut donc pas vu sa position etre totalement franc. Par contre il se doit d’engager des actions coherentes en terme de lutte contre le dopage, et c’est ce qu’il fait pour l’instand. En esperant que ça dure…

  2. C’est limite comique. Hier Gerard Holtz offre une médaille à Zabel, qui revetait en nième maillot vert, pour son courage lors de ses aveux de dopage. Des éloges des éloges… on en est pas là -quoique…- mais on félicite un criminel pour son courage lorsqu’il avoue???

    Et puis quel courage d’attendre de ne plus rien craindre pr avouer d’avoir tricher. Nan sans dec je trouve plus de mot…

  3. Ne trouvez-vous pas une ressemblance de riis avec (outre prud’homme) jan ullrich ? Etonnantes ressemblances en série, je suis piqué au vif…

  4. Cet (exellent) article rediffusé 3 ans après sa parution n’a pas pris une seule ride. Il sera toujours d’actualité dans 10 ans, dans 20 ans…..dans 50 ans, sauf si le cyclisme n’existe plus, ce qui est possible.
    Et tous les ans nous célèbrerons la mémoire, les exploits passés de nos anciens champions, « trop tôt disparus » et « ravis prématurément à l’affection des leurs »
    A l’époque où paraissait cet article, Laurent Fignon, le modèle de Bjarne Riis, tempêtait contre les coureurs français et leur passivité dans le TDF. Et surtout de marteler que le dopage des autres n’avait strictement rien à voir avec l’absence de performances des Français…
    On connait la suite.
    Je souhaiterais cependant souligner que le dopage sanguin n’a pas commencé avec l’EPO. Dans les années 70, environ 1 mois avant le TDF, nombre de coureurs partaient en stage en altitude et revenaient avec un sang riche en globules rouges. Par exemple, Joop Zoetelmek ne s’est jamais caché de pratiquer des auto-transfusions. Il n’avait pas à s’en cacher car ce n’était pas considéré comme du dopage.
    Pour conclure ce commentaire, je rappellerai ce que disait Raphaël Géminiani en 77: « Les contrôles anti-dopage, c’est le cancer du cyclisme ».
    Monsieur Gem’, dit « le Grand Fusil » a plus de 85 ans et coule une retraite paisible dans son Auvergne natale.
    Au fait, que sont devenus ses copains Fausto et Louison? Et son ancien coureur prénommé Jacques?

  5. Faut-il rire ou pleurer en relisant cette série d’articles, toujours aussi pertinents 5 ans après?
    Sinon, quel bel été que cet été 2012!
    Après le show Sky sur le Tour, puis l’exécution publique d’Armstrong, on assiste maintenant sur la Vuelta à une formidable démonstration d’un trio d’espagnols survitaminés… Les commentaires admiratifs des gars d’Eurosport sont un vrai régal.
    Cordialement.

  6. Les commentaires circonspects de l’excellent (avec un « c ») Patrick Chassé n’inclinaient pas à l’enthousiasme ou dit plus trivialement, n’étaient plus assez vendeurs. La réserve, le doute ou tout simplement la lucidité ne sont pas bons pour le business.

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