Saison 5, épisode 4 : « Nous, on a aimé »

Qui l’eût cru ? Le troisième épisode du Domenech show a coûté sa place à l’ancien quotidien de référence du sport. Depuis, la presse a créé pire.

Le Vestiaire avait annoncé la couleur. Une équipe de France à la hauteur repose sur un numéro 10 et quand il s’appelle Platini ou Zidane, c’est encore mieux. Le succès des Feux de l’Amour a été basé sur les mariages et les manipulations de Victor Newman et de sa moustache. Celui du Domenech show repose sur les exploits de Raymond sans sa moustache. Les ingrédients sont les mêmes, plus les héros sont méchants, plus l’audience frémit. Comment Platini et Jacquet pouvaient-ils confier les Bleus à Houiller et son charisme de vendeur de chichis ?

Souvenez-vous, Domenech est en grand danger avant la Roumanie. La presse se déchaîne, sans raison évidente. Le bilan du sélectionneur ressemble à celui d’Henri Michel. Pas sa fin. Escalettes, en pleine découverte des valeurs de la témérité, prend des vacances, alors que tout le monde le croyait à la retraite depuis 15 ans. Mais Domenech n’est jamais meilleur que dans l’adversité. Contre les Libanais, il aligne son équipe habituelle, celle qui a gagné l’Euro 2008 sans Thuram.

Un 10 impensable

Dans l’équipe type, il ajoute aussi le fils d’un copain entraîneur, qui n’a jamais rien prouvé, ça se fait dans toutes les entreprises. Une humiliation de plus, ça embellit un bilan. Les 45 premières minutes renforcent encore Domenech à son poste. Il n’y a plus aucun doute sur l’issue de la future réunion du comité des fêtes. Mais 45 minutes plus tard, on s’est rendu compte que Zidane était revenu à Bordeaux. Gernot Rohr était dans le jardin en train de couper sa ciboulette pour cette délicieuse salade de tomates du dîner. Il est 21h55, ça en dit long sur sa lucidité. Domenech doit revoir ses plans. Le retour de l’homme Zidoine lui ouvre une fenêtre. Ca l’ennuie un peu : il n’y croyait plus et avait déjà prévu une sortie de secours à la mesure de l’homme de théâtre qu’il est : siffler lui-même l’hymne tunisien avec un masque de fantôme sur le visage. Il n’aura pas à le faire.

Escalettes show

Il s’appelle Jean-Pierre Escalettes. Sa notoriété, sa naissance au début du XXe siècle et son expérience du haut-niveau ont fait de lui un petit homme courageux. Convoqué par Sarkozy, après France-Tunisie, pour ses excès de bravoure au moment des hymnes, il se déclare écoeuré. Il le sera beaucoup moins quand Platini trouvera que l’idée d’évacuer un stade est stupide. Après tout, Platini a peut-être raison, comment savoir ? Peut-être dormait-il à l’instant fatidique, on approchait les 21 heures. Sa témérité se signale toujours dans les moments les plus durs. Alors qu’il envisage de virer définitivement Domenech, ce dernier est réélu triomphalement, non sans que Papy soit allé se cacher loin des caméras. Il a bien raison Maître Courage, président de Fédé, c’est tout sauf un boulot médiatique.

En plus, il n’est pas gâteux du tout. Alors que la France est quatrième de son groupe avec 4 points et sort d’un match nul face à la Birmanie, il déclare avoir vu la construction d’une véritable équipe, avant de prendre à témoin Gérard Houiller, un autre grand entraîneur. Ce n’est pas la moindre de ses qualités, car Maître Courage s’exprime plutôt bien pour un communiquant. Dénonçant avec justesse la communication de Domenech, il utilise la très charmante parabole du vinaigre sur une plaie. Alain Rey (photo) et ses amis linguistes devraient publier une étude du cas dans les prochains mois.

Escalettes chaud

Maître Courage est aussi un homme de conviction, fidèle à ses valeurs et à sa parole. En un mot, il est intègre. Après l’Euro et les palabres de son sélectionneur, il maintient Domenech en lui demandant 5 points et des déclarations sobres. Raymond a 4 points et parle d’odeur du sang et de guillotine, il est toujours là. Et si Maître Courage était bien à sa place ? En progrès, il s’entiche du cumul des mandats. Non content d’avoir ramené Kostadinov dans les couloirs de la DTN, il se permet un Euro 2008 remarquable, fait tourner son équipe Espoirs comme à l’époque de Domenech. En sus, il compte se représenter. Comment s’écrit retraite ? Si la valeur n’atteint pas le nombre des années, alors il est plus vieux qu’on ne le croit. En fin politicien, il sait calculer. Il voulait virer Domenech pour être reconduit, finalement il a changé d’avis dans un accès de patriotisme. Quant à la grève des joueurs, Maître Courage ne voulait pas en parler, fier comme Artaban, il a glissé que finalement ça ne lui disait pas trop. Le courage des opinions. Son plus bel héritage restera donc pour toujours le maintien du Domenech show.

Le rotor de Raymond

Notre héros shakespearien est donc renforcé, comme au bon vieux temps, il a les mains libres, les téléspectateurs ne vont pas le regretter. Pour sa première sélection post triomphe, ce soir, Raymond a décidé de la jouer sobre. Les attaquants tricolores cartonnent un peu partout en Europe, il n’a que l’embarras du choix : Nasri, Anelka, Benzema, Henry. Il peut aussi piocher Ben Arfa, et même Saha, même s’il ne joue plus à Metz depuis bien longtemps. La liste est sans doute trop courte. Ce n’est pas la première fois qu’il détecte un évident manque de réservoir en attaque. C’était déjà le cas en mai, il avait comblé le vide avec Gomis.

Cette fois, ses adjoints ont fait le boulot, ils lui proposent Pouget, Chapuis et même Marc Libbra, qu’ils ont aperçu un samedi aprem dans le Onze d’Europe, en plateau, pas sur le terrain, mais pour eux c’est pareil, ils ont bien raison. Domenech prend Briand. Mais la liste est encore trop courte, Le 10 sport le réclame à corps et cri, il faut essayer Hoarau. Domenech a lu quelque part qu’un jour Jacquet essaya Ouedec et comme tout le monde il ne lit pas les nouveaux torchons. Il prend Savidan. Si ce dernier avait eu l’âge d’Hoarau, lequel aurait-il pris ? Pagis ne pourra jamais en être sûr.

Boumsong-Lassana-Savidan : la colonne verte en branle

Au milieu, Vieira et Makélélé sont toujours les meilleurs, même s’ils ne jouent plus depuis deux ans. Domenech, qui est chanceux comme un cocu, et ça n’a rien à voir avec l’arrivée de Giuly à Paris, dispose en plus de Toulalan d’un sosie du Pat : Alou Diarra. Dès la coupe du Monde 2006, il avait vu la ressemblance. A l’époque, il n’était pourtant qu’une sentinelle violente du Lens pas champion de France. Aujourd’hui, il est incontournable, son retour en bleu se fait donc difficilement. Logique. C’est Lassana qui est titulaire dans les pattes de Toulalan. En vrai Praud, David Astorga a compris la subtilité : pas de question.

Enfin, coté défense, la provocation a assez duré. Domenech a gardé son poste en alignant Boumsong. Escalettes est humilié, les blagues les meilleures sont les plus courtes. Boumsong est ce qui fait de pire en Ligue 1, Raymond le sait, les abonnés de Canal aussi. Ces derniers ont eu tellement de piqûres de rappel qu’ils en sont devenus toxicos. Mais finalement, il le rappelle, en renfort. Les lois du destin sont parfois cruelles, celles du foutage de gueule impénétrables.

Anelka est redevenu le grand buteur qu’il aurait toujours dû être, comme Le Vestiaire l’y destinait. Domenech hésite encore : autour d’Henry, qui mettre : Savidan, Benzema ou Briand ?

Une réponse sur “Saison 5, épisode 4 : « Nous, on a aimé »”

  1. “En vrai Praud, David Astorga a compris la subtilité : pas de question.”

    Excellent !

    Est-ce parce qu’il a joué arrière droit que Domenech a autant de mal avec ce poste ? Après le long scandale Clerc, il oublie maintenant Chalmé. A moins qu’il ne préfère Jurietti ? Enfin, Réveillère n’est pas revenu, c’est toujours ça.

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