Angleterre-France : Le quinze de l’arrose

Un seul des deux sélectionneurs a déjà été champion du monde. Mais lequel ?

Toute la Nouvelle-Zélande tremble déjà et la Ceinture du feu du Pacifique n’y est cette fois pour rien. Même si sa belle série de deux matches sans défaite a pris fin, samedi soir, dans le jardin anglais, la France a envoyé un message on ne peut plus Clerc à son futur adversaire du Mondial : elle peut rivaliser avec n’importe qui pendant 40 minutes. Ferme et tenace, la bande à Lièvremont prend du volume : pathétique contre l’Australie, en novembre ; ridicule contre l’Ecosse, pour l’ouverture du Tournoi ; à la rue, il y a deux semaines, en Irlande ; elle a cette fois sorti son « match le plus abouti » depuis des mois. Et dire que Médard n’était pas là.

Au Trinh où vont les choses, c’est simple, il faudrait un séisme pour que cette équipe-là n’aille pas jusqu’au bout en Nouvelle-Zélande, sur Stewart Island. Les motifs de satisfaction sont nombreux après ce France-Angleterre. D’abors, les Bleus n’ont pas attendu, cette fois, d’avoir pris trois pions pour se mettre à défendre. Ils ont su sans jouer sans Parra, sans Poitrenaud et sans ailier droit et Marc Lièvremont a vu à la vidéo « des choses intéressantes dans l’animation offensive ». Il n’a pas précisé, par contre, s’il pensait aux zéros franchissements ou aux zéros essais.

La clé sous le Palisson

Notre ancien chroniqueur Peyo Greenslip, depuis sa lune de miel à Rome, nous a aussi confié par sexto avoir vu des choses moins intéressantes, comme ces Français revenus des vestiaires avec les mêmes intentions qu’en début de match contre l’Irlande. Si Wayne Barnes avait été là, les champions d’Europe en titre n’auraient pas regretté aussi longtemps leur seule occasion d’essai, sur un jeu au pied. Mais Wayne Barnes n’était pas là, Chris Ashton a fait son saut de l’ange dans le vide et on va nous faire croire qu’il n’y aucune raison de s’inquiéter à six mois de la Coupe du monde.

Incapable, en trois ans, de pondre un plan de jeu cohérent, Marc Lièvremont masque son impuissance derrière une irascibilité nouvelle en conférence de presse. Ca nous rappelle curieusement quelqu’un. Ses joueurs ont donné à Twickenham l’image d’un groupe en autogestion à qui seul l’orgueil a permis de sauver les apparences en première mi-temps. A part ça, Chabal ne fait plus peur qu’à la femme de ménage du musée Grévin ; Huget, comme tous ceux qui le regardent jouer, ne sait pas vraiment ce qu’il fait là ; Palisson non plus ; les rhumatismes de Jauzion ne supporteront pas 25 h d’avion jusqu’à Auckland et Guirado n’a toujours pas compris pourquoi Crunch sponsorisait le match sans offrir une seule tablette.

Serge Blanco : « C’est pas du Lux »

Le responsable éditorial de notre service pelote basque a profité du dernier week-end sans rugby pour aller voir Toulouse-Biarritz et s’offrir quelques jours de thalasso à Hendaye. Il y a partagé son jacuzzi avec Gareth Thomas et Serge Blanco.

LE VESTIAIRE : Serge, vous avez demandé la semaine dernière à nos confrères de L’Equipe ce que vous pourriez bien « aller foutre à l’IRB ». Pourquoi ne pas vouloir étendre votre influence dans le monde du rugby ?

SERGE BLANCO : Je suis déjà à la tête d’une maison de retraite, d’un hôtel de Lux et du casino de Gujan-Mestras. Tous les trous du cul de la Sorbonne portent mes polos à 90 euros et je suis président à vie de la Ligue nationale. Vous comprendrez que je lâche pas tout ça pour aller me faire Lapasset.

GARETH THOMAS : Et pourtant, il est bien conservé.

LE VESTIAIRE : Vous préférez peut-être la présidence de la FFR ?

SERGE BLANCO : Je viens de te dire que j’en avais rien à branler de toutes ces conneries (Gareth Thomas sort les mains des poches de son short de bain). Pierre Camou fait du super boulot à la Fédé. Il trouve jamais rien à redire à ce que je lui demande.

LE VESTIAIRE : Camou est-il une marionnette ?

SERGE BLANCO : Je ne crois pas l’avoir déjà vu aux Guignols. Ni au musée Grévin.

LE VESTIAIRE : Il a récemment préempté les voix de la Ligue à l’ERC pour faire réélire Jean-Pierre Lux au nom de « l’intérêt national du rugby ». Qu’est-ce que ça vous inspire ?

SERGE BLANCO : (Il prend une grand bouffée d’air) Je m’en bats les couilles. Il n’y a que le terrain qui m’importe. Après, si Lux rajoute encore deux places pour les clubs français en H-Cup la saison prochaine, ça pourrait peut-être permettre à Biarritz de la jouer.

LE VESTIAIRE : Que penser des deux premiers matches de l’équipe de France dans le Tournoi ?

SERGE BLANCO : A l’époque, Marc Cécillon se serait tiré une balle si on avait gagné en Irlande en marquant deux essais de moins qu’eux. On a aujourd’hui une génération de tarlouzes.

GARETH THOMAS : (En sortant la tête de l’eau) Qu’est-ce qu’il y a, Serge ?

SERGE BLANCO : Rien, rien. Continue à faire des bulles, Alfie.

LE VESTIAIRE : Le French flair est-il mort ?

SERGE BLANCO : Foutaises ! J’y ai encore mangé un croque la semaine dernière.

Marchons ensemble à Twickenham

allez

Ce n’était pas une demi-finale de Coupe du monde, mais ça y ressemblait. Ce n’était pas non plus un Australie-Portugal. C’était quoi, alors ?

De notre envoyé spécial permanent dans les faubourgs de Bristol

Faudra-t-il que Le Vestiaire réserve à Marc Lièvremont le même traitement qu’à Domenech et Forget pour que les instances dirigeables du rugby tricolore prennent enfin conscience de son manque de légitimité à la tête de l’équipe de France ? Ses deux haltères ego ont davantage de vécu, il n’y a pas de quoi en faire un Show, mais on a sûrement vu dimanche la pire sortie des Bleus depuis que les Six Nations se jouent à cinq et demi.

Le XV de France a pris la campagne publicitaire de Nike un peu trop au sérieux : à force de vouloir marcher sur Twickenham, il en a oublié qu’il était aussi parfois utile de courir un peu. A son manque d’engagement se sont en plus ajoutés les deux pieds gauches de Parra et des lacunes défensives plus vues depuis la petite finale argentine. Il n’y a bien que le niveau jeu de son équipe que Lièvremont a réussi à faire reculer.

Pour Wilkinson le Glas

Dans son hommage à William Gallas, Le Vestiaire avait évidemment refusé de céder à la facilité il y a deux semaines, après une victoire en trompe l’oeil contre la Nouvelle Zélande d’Europe. La France, dans son chaudron de Saint-Denis, venait alors d’humilier de cinq points la meilleure équipe du monde. Son Tournoi était fini. A quoi bon aller risquer une blessure en Angleterre alors que les phases finales du Top14 approchent ?

Le trio fédéral parachuté à Marcoussis a su trouver les mots pour motiver ses troupes. Il aurait peut-être pu y ajouter quelques abstractions : dignité, envie, combativité. Placage et replacement n’auraient pas non plus été de trop sur la fiche de Chabal : il a plaqué en première mi-temps trois fois moins d’Anglaises que Cipriani au lycée.

La pluie et le pied de Wilkinson n’y sont cette fois pour rien. Le fond de jeu français est si bien en place qu’on en craindrait presque les rouflaquettes de Griffen. Espérons seulement que le résultat en Italie, quel qui soit, n’influence pas la seule issue logique de ce Tournoi : l’éviction de Lièvremont.

Pendant ce temps-là, le premier qualifié de la zone Asie tremble déjà. Il ouvrira sa Coupe du monde contre la France de Fabien Galthié, le 10 septembre 2011.

L’Edito : Ici les enfoirés

cap

« 60e minute, Tillous-Bordes sonne la charge. » Mathieu Lartaud ne le sait pas encore, mais il vient de susciter des milliers de rêves internationaux chez tous les joueurs de Fédérale 3.

C’est un heureux concours de circonstance. Dix jours à peine après avoir été promu « Enfoiré », Sébastien Chabal a enfin levé l’ensemble des doutes à son sujet. Ses partenaires n’hésiteront pas à lui administrer de vive voix son doux sobriquet. Il pourrait leur répondre la même chose, sans problème.

Le hasard est parfois facétieux, pas comme le haut niveau, qui interdit de regarder en marchant une action de l’adversaire. Ca vaut à la première minute à Twickenham quand on est barbu ; ça vaut aussi quand on reçoit Auxerre et qu’on est chauve. Un but aurait suffi à l’AJA, mais Lyon est décidément dispendieux ces derniers temps. Et comme le sport français n’en est plus à une humiliation près, Nelson a encore interrogé Gallas à propos de Bastareaud.

God save the cuir

Si le haut niveau se joue de certains, d’autres jouent avec le haut niveau. Sébastien Loeb a décroché son cinquantième rallye. Bourdais prie pour finir autant de GP dans sa carrière. Loeb vivant, un volant à la main, aucun autre pilote ne gagnera cette saison, et Le Vestiaire l’avait déjà dit. L’autre Sébastien, Jean-Baptiste Grange, a aussi bouclé sa saison comme il faut. Après des Mondiaux de rêve et quelques quarantièmes places prometteuses, il a réduit sa vitesse au bon moment, c’est-à-dire le dernier.

Auxerre aurait aussi pu être l’ultime match de Claude Puel, mais Benzema reste, il y a donc encore une chance de gagner la Ligue des Champions. En attendant l’an prochain, Liverpool a torché Manchester chez lui, grâce à Torres, l’autre caïd.

Pendant ce temps-là, Sylvain Chavanel et Richard Gasquet sont en forme. Ca veut pas dire que Joubert sera champion olympique.

L’Hommage : Inglourious Bastareaud

william

« Si on gagne, on sera des génies. Si on perd, on passera pour des cons et des incompétents. » Il s’en est quand même fallu de peu pour que Lièvremont confirme lui-même tout le bien que Le Vestiaire pense de lui.

Marc Lièvremont avait retourné la caisse Thion dans tous les sens, sans trouver d’autres solutions qu’au fond des tiroirs du Top14. Ses grands projets enterrés sous la pelouse de Croke Park, il s’était presque résigné à accepter enfin l’héritage de ses prédécesseurs. Jouer ou gagner, il fallait bien choisir.

La victoire contre l’Ecosse n’avait pas suffi à faire taire les critiques. La presse est parfois bien cruelle. Le Vestiaire lui-même n’y avait pas consacré d’article. Et puis, le Pays de Galles est passé par là, entre Paris et Beauvais, avec cette étonnante capacité de déjouer encore plus que la France quand il est favori.

Le XV tricolore a retrouvé lui le rugby complet de ses glorieuses années. Son engagement physique et les coeurs en peine de l’armée rouge ont fait chanter le Stade de France comme Max Guazzi en a rêvé. Un groupe est né, hier, dans le chaudron de Saint-Denis, et Didier Retière tient enfin son match bref et rance.

Baby one more time

On en oublierait presque que gagner de cinq points à domicile contre le Pays de Galles n’était pas vraiment un exploit quand Ibanez était encore de ce monde. Qu’importe, la relève de Beauxis est assurée à l’ouverture si on peut battre les All Blacks du pauvre en y mettant le premier arrière venu.

La charnière Parra-Baby a tellement séduit en première mi-temps que les Gallois n’ont jamais compté plus de dix points d’avance. Bastareaud s’est chargé du reste, comme il sait le faire : en courant droit devant lui. Et quand bien même il en fait déjà le double de son demi de mêlée, le Parisien, aujourd’hui en France, devrait encore prendre un peu de poids dans cette équipe.

Médard, lui, n’a pas trop de mal à faire oublier Poitrenaud derrière, et la troisième ligne la plus compétente du Tournoi est fin prête à marcher sur Twickenham. Elle pourrait même courir un peu.

Pendant ce temps-là, Lièvremont fera souffler ses héros contre l’Angleterre. Il a encore un peu de monde à voir.