Christian Bîmes l’a accueilli en héros à l’aéroport, persuadé qu’il gagnera le prochain grand chelem français. Tsonga ressemble de plus en plus à Clément et consorts. Mais ressemble-t-il à Noah ?
L’histoire du tennis français est comme Gervais Martel : elle bégaie. Jo-Wilfried Tsonga a battu Nadal en trois sets, au terme d’un match ébourrifant, après un parcours exceptionnel. Suffisant pour en faire le futur numéro un mondial. Pourtant, contrairement à Thierry Tulasne ou Arnaud Di Pasquale, il n’a jamais été numéro un mondial junior. Seulement dauphin, comme Julien Jeanpierre…
Les lauriers pleuvent, Denisot fait plus d’audience qu’avec Mauresmo, à qui seule Mireille Dumas s’intéresse désormais. Mais son parcours n’a rien d’inédit. Clément, en 2001, sur ces mêmes terres australes, élimina Robredo, Martin, Federer, Rusedski, Kafelnikov et Grosjean. Avant de sombrer, drapeau bleu et blanc à la main, contre Agassi en finale. Les Français sont toujours des finalistes souriants sur la photo d’après-match, avec le petit trophée du cocu. Sympathique : un petit mot pour le public et une déclaration uniforme : « Je n’ai pas de regret, j’ai tout donné. » Le Vestiaire l’avait écrit avant la finale : s’il joue à son meilleur niveau, il gagnera. Il a baissé de pied donc il a perdu. Ne pas avoir de regret, se satisfaire du parcours, c’est avoir l’ambition d’un sprinter français.
Mat, maté, Mathieu
Tsonga, comme Clément, Pioline, voire Escudé (demi-finaliste à Melbourne en 98… à 22 ans) et même Mahut, à son niveau (finale perdue contre Roddick au Queen’s après un match d’anthologie contre… Nadal), ont établi la jurisprudence française. Sans parler de la finale de Coupe Davis de Mathieu contre Youzhny en 2002, un modèle breveté pour des années. Une semaine auparavant, il gagnait tout et devenait le futur sportif français vainqueur de grand chelem. Un parcours hors du commun, porteurs d’espoirs aussi grands que Mario Ancic, autant suivi d’effets qu’une prédiction du président de la FFT après quelques jeux de flûtes au champagne avec la femme à Chamou.
Son parcours montre que Jo-Wilfried est dans la forme de sa vie, en ajoutant Adélaïde. Pas qu’il est un joueur plus prometteur que les autres loosers chroniques précédents. S’il joue deux demi-finales de grand chelem dans l’année, il se distinguera des autres. Roland Garros et surtout Wimbledon seront deux révélateurs plus fiables que la fidélité de Virenque. Seul Pioline a réussi à confirmer en retrouvant Sampras en finale de Wimbledon par la suite. Clément, lui, n’a jamais confirmé : sa finale l’a conduit à se lancer dans le tennis exhibition avec Llodra. Au passage, la France du tennis peut lui en vouloir d’avoir flingué la carrière de numéro 1 mondial de la vache Grosjean, sans réaction après sa demi-finale perdue, malgré deux sets d’avance. Faire une Mathieu contre un autre Français, ça c’était fort.