Route du Rhum : Un Marc ne vaut pas un copec

Si le nom de Marc Pajot vous évoque quelque chose, c’est que votre dernière heure n’est plus très loin. Car si le personnage a bien existé, c’était bien avant l’avènement de Sylvester Takac à la tête de Sochaux. Cela ne vous dira rien, mais il a participé aux JO de 1972 et en a même ramené une médaille d’argent. Il en a d’ailleurs tellement profité qu’au moment de sa vraie carrière, dans la course au large, à partir des années 1980, il décidera de laisser à ses adversaires le rugueux plaisir de gagner.

En 1978, c’est au fond de l’eau qu’il terminera la première Route du rhum. D’une volonté exemplaire, il épinglera cette même course quatre ans plus tard; il n’y avait donc pas que Florence Arthaud qui y participait. On en restera là. La suite est réservée à un public averti. Capitalisant sur son maigre crédit, Marc Pajot viendra pourrir pas moins de trois coupes de l’America. Enfin presque, puisqu’il ne franchira jamais les régates préliminaires. Depuis 1995, on lui a officiellement interdit de représenter la France. Fauché en plein vol, il n’avait que 42 ans.

Michel Desjoyeaux : « Foncia tête baissée »

joyaux

Hélitreuillé par la marine bolivienne sur le monocoque de Michel Desjoyeaux, notre spécialiste à voile, et à vapeur, a partagé le quotidien du leader du Vendée Globe : sardines et vin blanc. C’était l’heure du p’tit Desj’.

QUESTION : Michel, comment avez-vous vécu le sauvetage héroïque de Jean Le Cam par Vincent Riou ?
MICHEL DESJOYEAUX : Allongé sur ma couchette, dans la cellule de vie. Je venais juste de télécharger le Best Of  Youenn Gwernig quand Vince (Riou) m’a poké sur Facebook. Il avait plus de forfait, alors je l’ai rappelé et il m’a dit que Jeannot (Le Cam) était avec lui, bien au chaud. Je sais pas quel radiateur il a, mais moi je me les gèle ici.

Q. : Une fois encore, les marins ont fait preuve de leur formidable solidarité…
M. D. : Vous savez, j’aurais certainement fait la même chose si j’avais pas eu trois jours d’avance sur tout le monde. Le règlement nous y oblige de toute façon, alors faudrait quand même pas en faire des tartines au beurre. Et puis, entre vous et mon bateau, ça m’arrange pas mal toute cette casse. Y manquerait plus que Bilou (Roland Jourdain) se déboite l’épaule et je pourrais m’arrêter une semaine aux Canaries avant l’arrivée.

Q. : Craignez-vous le retour de Roland Jourdain pendant la remontée de l’Atlantique ?
M. D. : En fait, ça fait deux semaines que je l’attends. J’ai plus du tout de sel, mes pâtes lyophilisées prennent trois heures à cuire. Et mon carton de kouign amann a pris la flotte dans le Pacifique, mais Bilou pourra sûrement me dépanner quelques boîtes de Sodebo.

Q. : Est-ce ce côté « aventurier » qui vous a convaincu de revenir sur le Vendée Globe cette année ?
M. D. : J’ai effectivement toujours eu ce goût pour le grand large et les Inconnus. Ici, vous voyez, je suis seul face à moi-même, la mer, mon ordinateur de bord, mon téléphone satellitaire, ma boussole électronique, mon pilote automatique, mon GPS et mon équipe de quatorze hommes, à terre.

Q. : Dans l’ère technologique qui est la notre, une course comme celle-ci a-t-elle encore un sens ?
M. D. : Bien sûr, de gauche à droite, autour de l’Antarctique, comme ç’a toujours été le cas. C’est plus facile pour les potes, on doit se faire une crêperie quand y seront tous arrivés, dans trois ou quatre mois.

Q. : On a comme l’impression, à vous entendre, que vous souffrez d’un manque de concurrence…
M. D. : C’est comme ça, on va quand même pas faire revenir Tabarly. Je leur ai pourtant laissé deux jours d’avance cette fois, mais ces cons-là seraient capables de se faire battre par une Anglaise de 20 ans.

Q. : Où trouvez-vous donc la motivation pour vous lancer sans cesse de nouveaux défis ?
M. D. : Vous avez déjà été marié ? (Ndlr : Il s’arrête et attend que je sorte la tête de ma bassine pour lui faire signe que non.) Et  bien, vous comprendrez un jour. Je ne remercierais jamais assez Foncia de me donner tous les quatre ans une bonne excuse pour passer Noël en paix. J’ai pas oublié non plus d’envoyer mes vœux par mail à Philippe Jeantot. J’espère qu’ils ont le wi-fi à Fleury-Mérogis.

Propos (presque) recueillis par Roger Secrétain