Les Français ouvrent ce soir leur Mondial face aux Argentins, qui ne leur ont guère réussi sous l’ère Laporte. Mais ils n’ont pas le choix…
Par Peyo Greenslip
Des années qu’on y pense, des semaines qu’on s’y prépare, des jours qui font que l’on finit par en douter… A vrai dire, cette Coupe du monde qui s’ouvre ce soir, c’est un peu comme un dépucelage, ce grand saut dans l’inconnu qui doit faire de vous des hommes. Et pas seulement parce que, nous autres, cocardiers de Français que nous sommes, attendons que les Coqs déflorent leur palmarès mondial. Non, c’est plus que ça. Peut-être parce que ça se passe chez nous, au domicile familial, sans déranger papa et maman qui dorment à côté. Peut-être aussi parce qu’on a tant éventé l’événement et un succès au bout des doigts que c’est finalement la peur qui s’est immiscée jusque sous les ongles.
Le pack au pas
Mais maintenant que les préliminaires ont été expédiés, la moindre erreur sera fatale. Le kiki mou de Milloud ; comme le caleçon mouillé de De Villiers. Car la première épreuve des libertins en herbe tricolores passera par la rudesse du pack argentin. Un test à balle réelle pour des avants français à qui tout faux pas est interdit sous peine de se ramasser les Blacks dès les quarts-de-finale. Après trois victoires amicales, des questions demeurent en effet sur la tenue de la mêlée et de l’alignement tricolores. Les rythmes et les pas endiablés du tango Puma devraient ainsi mettre à mal les articulations du pack français, qui devra trouver des ressources pour donner la réplique à sa cavalière latine et laisser entrevoir les jambes de ses prétendants de l’arrière. Car si la France s’apprête à un rude corps à corps devant, les trois-quarts tricolores devraient pouvoir se régaler des parties charnues de la féline argentine, dont l’axe du terrain apparaît comme plus hospitalier. A condition de régler toutefois le problème des trublions de la charnière.
Faire taire (Patrick) Hernandez
Pour cette tâche, M. le secrétaire d’Etat a associé Rémy Martin au Biarrot Serge Betsen. L’abattage du gigolo parisien a été préféré à la perforation du toulousain Dusautoir. Un choix qui montre bien les intentions du sélectionneur français : museler la charnière Pichot/Hernandez au prix d’un pressing extrêmement haut. Pour cela, il sera demandé aux flankers tricolores d’harceler sans cesse les maîtres à jouer argentins, dont la roublardise, l’habileté et le génie pèsent comme une terrible menace pour les Bleus. Hernandez, rugbyman international le plus abouti à l’heure actuelle, est né pour être vivant et inoculer le danger au moindre ballon qui lui échoie. En bon artificier, el Mago ne devrait ainsi, par exemple, pas se priver d’allumer quelques pétards au-dessus d’un Cedric Heymans novice à l’arrière (le niveau des Gallois étant aussi déshérité que les docks boueux de Newport).
One shot
De dépucelage, il ne sera pas question pour tout le monde lors de ce rendez-vous dont un des outsiders au titre mondial sortira défroqué. Les deux entraîneurs tireront eux leurs dernières cartouches à l’occasion de cet événement international. Laporte, délesté de ses contrats publicitaires, s’en ira débouchonner de la bourgeoise dans les palaces politiques pendant que son homologue argentin, Marcelo Loffreda, changera de monture et s’accommodera de tigresses des bas-fonds de Leicester. Chacun ses valeurs. Attention à ne pas souiller celles, ancestrales, du rugby… Pour les jeunes Bleus, le rendez-vous des hommes c’est ce soir, 21 heures.