Personne n’a donc pu inverser la tendance, pas même lui. Le panneau publicitaire de près 2m s’est écroulé, comme prévu. Avant de redécouvrir toutes ces jolies choses ci-dessous, souvenons-nous que le story telling de sa légende a été réécrit : l’hagiographie La quête autoproduite par ses soins et sa boite de com France TV, faisait donc désormais référence à la quête de la médaille de bronze. On avait pas bien compris. Vive la communication.
Même les monuments les plus solides finissent un jour par se fissurer. Celui-là semble avoir été détruit pour toujours. En attendant la quête de la huitième place en 2024.
Quand un bâtiment de près de 200kg s’effondre, même sur un tatami, cela s’entend à des milliers de kilomètres à la ronde. Voire des millions. Ce bruit fut surtout celui de l’humiliation. Et de la honte ressentie par Franck Chambily et Laurent Calleja quand ils ont vu leur si lourd protégé se faire ridiculiser par un Japonais bien moyen. L’honneur est sauf, ça aurait aussi pu être l’Autrichien du tour précédent. Voire le Hongrois du premier tour qui a miraculeusement reçu l’extrême onction, de la part de l’arbitre, toujours aussi prompt à sauver la mise de la légende du judo pendant le Golden Score. Mais il y eut pire : Tamerlan Bashaev. Un Russe qui ressemblait vaguement à un judoka mais suffisamment pour renvoyer Riner à sa deuxième humiliation. La troisième si on se souvient de Joseph Terhec.
Teddy pire
Pour devenir une légende il faut avoir un certain âge. Teddy l’a atteint. Et après avoir passé autant de temps en pyjama à distribuer des baffes, on peut comprendre qu’il soit un peu lassé. D’autant que son statut est assuré pour longtemps comme son compte en banque. Il faudra quelques années avant que les médias refusent de payer les 20 000 euros que le Géant réclame pour 20 minutes d’interview. Il faudra en revanche, à ce rythme, sans doute moins de temps pour qu’Under Armour ou Ford retranchent quelques millions aux contrats du plus grand judoka de tous les temps. Mais ça le gentil Teddy s’en fout un peu du moment que la boutique tourne et que tout le monde croit qu’il est devenu champion olympique cet été. Il l’a été, certes, mais Axel Clerget et Guillaume Chaine aussi, et en même temps. Jusqu’à ce sinistre dimanche parisien et ce vendredi tokyoite, l’histoire était belle. Riner était un super champion, humble et ambitieux, avec plein de jolies marques sur son kimono. Il semblait invincible, même dans un état de forme précaire. Calleja, débauché de son pôle calédonien pour rassurer son ancien élève, et Chambily, le gars qui doit supporter le colosse au quotidien, priaient régulièrement pour que la providence et les arbitres continuent de l’accompagner. Ces fameux arbitres qui sont curieusement toujours pointés du doigt par le vieux géant pour expliquer ses défaites. Mais il n’en a pas toujours été ainsi.
Le son du Riner
Tout le monde sait que la série de Teddy Riner aurait dû s’arrêter dès 2017 en demi-finale des Mondiaux de Budapest quand Tushishvili l’a balayé durant le Golden Score. Cela fait donc déjà plusieurs années que Riner n’est plus vraiment Riner et qu’il a laissé sa place à un placard publicitaire qui met des posts instagram pour rappeler qu’il s’entraîne de temps en temps et qu’il est gentil. Ça c’est pour le grand public et ceux qui veulent bien y croire. Pour les autres, il est surtout le patron autoritaire du judo français, au caractère difficile, qui n’aime que l’argent et un peu la gloire. Une star à qui tout le monde doit obéissance, surtout ses coachs, qui ne s’entraîne pas assez, trop occupé à prendre l’avion pour Baltimore. Mais on continuera à raconter qu’il voyage pour mieux prendre la température de ses adversaires les plus redoutables . Le brave Nico Kanning, grassement payé, est ravi d’être considéré en si haute estime. Il a d’ailleurs fini par s’en débarrasser comme on l’apprend dans la nouvelle version du film publicitaire diffusé par le service public. On avait pourtant dit fin de la pub après 20h.
Au final, le cocktail est explosif : l’âge, la méforme physique, la motivation en berne et la Course des champions qui n’interesse personne sur France 2. Le talent, l’aura et les prédispositions naturelles ne suffisent plus. Kageura a su en profiter, Bashaev aussi. A qui le tour ? Riner ne sera de nouveau champion olympique individuel que s’il se prépare enfin comme le sportif de haut niveau qu’il a cessé d’être. Mais même cela n’a pas suffit. Il peut bien prêter sa ceinture noire à Jeff Bezos.
Pendant ce temps-là le judo a rapporté des médailles à la France.